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A Angers, un McDonald’s condamné pour «harcèlement moral» et «discrimination» envers une employée transgenre

LGBT +dossier
Un restaurant franchisé McDonald’s a été condamné ce lundi 24 juin par le Conseil de prud’hommes pour «harcèlement moral caractérisé» et «discrimination liée à son identité de genre» envers une femme transgenre qui y était employée.
publié le 24 juin 2024 à 16h50
(mis à jour le 24 juin 2024 à 17h44)

Une décision qui pourrait ouvrir la voie à d’autres victimes. Le conseil de prud’hommes d’Angers a condamné ce lundi 24 juin un restaurant franchisé McDonald’s du Maine-et-Loire pour «harcèlement moral caractérisé» et «discrimination liée à son identité de genre» envers une femme transgenre qui y était employée. Dans sa décision, le conseil de prud’hommes estime notamment que Syntia D. «est victime d’une discrimination en raison de son identité de genre, de par l’interdiction pour ses collègues d’utiliser son prénom féminin et de la désigner au féminin».

«C’est un bon résultat. Aujourd’hui on a une décision qui est bien réfléchie, avec des montants de dommages et intérêts qui peuvent paraître décevants par rapport à nos demandes, car on avait demandé 30 000 euros. On a eu 7 000, plus les indemnités légales, donc à peu près 15 000 euros», a réagi Me Bertrand Salquain, l’avocat de la plaignante, à la sortie du tribunal. Syntia, 21 ans, qui est en arrêt maladie depuis mars 2023, a quant à elle fait part de son «soulagement».

«Reconnaissance de sa position de victime»

Après avoir été embauchée en septembre 2022, Syntia avait fait son coming out transgenre le 6 janvier 2023. Lors de l’audience qui s’est tenue le 15 avril 2024, elle se souvenait être venue au travail maquillée et avec des faux seins, sans craindre initialement la réaction de son entreprise et des collègues. Elle sentait chez eux une certaine «bienveillance», alors que le slogan de l’enseigne n’est autre que «venez comme vous êtes».

Mais très vite, la jeune femme relate avoir reçu remarques et pressions de ses chefs. Fin janvier 2023, elle est même convoquée à un «entretien de recadrage», au cours duquel on l’appelle par son «deadname» - le prénom qui lui a été attribué à la naissance et qu’elle a changé dans le cadre de sa transition de genre - et on lui demande de ne plus se maquiller.

Dans les jours qui suivent, ses responsables font tout pour empêcher l’emploi de son nouveau prénom, Syntia, au sein de l’équipe. Ils l’interdisent même par voie d’affichage dans le restaurant et rappellent à l’ordre par écrit deux collègues qui l’avaient adopté. A noter que dans son baromètre LGBT + 2022, l’Ifop souligne que trois personnes LGBT + sur dix ont «déjà été victimes d’au moins une agression LGBTphobe» au travail.

La décision finalement rendue par les Prud’hommes a été saluée par Charlotte Duval, secrétaire générale adjointe du syndicat des services du Maine-et-Loire CFDT, à la sortie du tribunal. Pour elle, «ce résultat est très positif» : «Que le contrat soit résilié, c’est aussi la reconnaissance de sa position de victime. Ça peut aussi ouvrir la porte à d’autres personnes qui vivent ce genre de situation pour en parler.»

L’avocat du restaurant, lui, n’était pas présent ce lundi pour commenter la décision. En revanche, l’employeur a réagi ce lundi après-midi : «La direction du restaurant de Segré prend acte de cette première décision du conseil de Prud’hommes, continue de contester les accusations dont elle fait l’objet et étudiera les suites à donner à cette procédure», peut-on lire dans un communiqué. Il ajoute également que «la lutte contre le harcèlement et les discriminations est prise avec le plus grand sérieux dans notre restaurant, comme dans tous les établissements de l’enseigne.»

Mis à jour : à 17 h 44, avec la réaction de l’employeur.

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