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«House of the Dragon» : Illiade la joie dans l’air

La deuxième saison nous plonge dans le chaos auquel la première nous avait préparés. Dépourvu des sources d’espérance de «Game of Thrones», son spin-off s’épanouit dans les ténèbres.
publié le 14 juin 2024 à 19h50

On nous avait promis une danse, on a un massacre. La loi du talion, des infanticides, un corps d’enfant exhibé lors d’une parade morbide pour se mettre le peuple dans la poche à l’heure où la légitimité d’un régnant est menacée. La première saison de House of the Dragon nous contait les événements déroulés sur des années qui devaient mener une dynastie, les Targaryen, à se déchirer et mener leur royaume à la guerre. La deuxième saison fait le récit de cette guerre, attendue de pied ferme par les connaisseurs et surnommée dans le canon du Trône de fer, tel qu’établi dans divers ouvrages par George R.R. Martin (qui codirige désormais l’adaptation aux côtés du showrunner Ryan Condal), la «Danse des dragons».

Une Iliade, entre palabres de cour, intimités et champs de bataille, hissant haut les accès de grand spectacle fantasmés (les dragons, bel et bien, vont danser pour nous). Mais dont on retient d’abord de quelle manière, et toujours à rebours d’une bienséance qui continue de tenir la fiction télévisuelle américaine dans un corset de dignité, elle noircit encore le trait dépravé de la première saison, assemblage enivrant des affaires de famille et des affaires de pouvoir, de la mort et du cul, hypertrophie licencieuse de tout ce que la série Game of Thrones avait amorcé. «Il n’y a pas d’absolution pour ce que j’ai commis», dit un personnage en écho à un autre qui, dans la première saison, annonçait qu’«à la fin, l’indécence prévaudra». A la différence de Game of Thrones qui maintenait toute une frange de personnages dans le camp de l’humanisme, la sauvagerie sans limite est ici justifiée par toutes les parties comme seule et unique condition du pouvoir. Belle image : deux jumeaux séparés par le hasard des jeux d’allégeance en viennent à se massacrer l’un l’autre. House of the Dragon est, dans la droite lignée d’Homère, une épopée de «mille maux» et une méditation opportune sur les jeux pervers des damnés de la politique à l’heure où les démocraties qui les ont investis du pouvoir sont tout près de s’effondrer. Danse macabre. Délice.

House of the Dragon saison 2. Sur Max.
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