Le titre programmatique de Becoming Karl Lagerfeld appelait presque une série d’invasion extraterrestre sur l’éclosion d’un homme qui viendrait d’ailleurs, extraterrestre rhabillé en poupée de cire à catogan poursuivi par un loufiat tenant une canette de Coca sur un plateau d’argent. Ou à un biopic façon mythe en mouvement sur un génie besogneux du prêt-à-porter élevé en héraut du capitalisme pop. En plein cluster de séries consacrées à la mode, The New Look (Chanel et Dior), Balenciaga hier et la Maison demain, on s’attendait à tout sauf à de la sobriété au moment de s’arrêter sur le cas de l’extravagant couturier allemand. Bien sûr, la retenue est toute relative quand elle s’installe dans le Paris couture des années 70-80. Imprimés orange et bleu, cols de chemises interminables, bottes en cuir rouge luisant… les détails de cette méticuleuse reconstitution clignotent façon bal costumé, mais la création d’Isaure Pisani-Ferry (Kaboul Kitchen, Braqueurs) résiste à la tentation de s’enivrer de son attirail bariolé, en s’accrochant aux regards réfractés d’une poignée de personnages qu’elle refuse de lâcher. Amoureux, prédateurs, honteux, jaloux, intoxiqués, compatissants.
«Becoming» débute au printemps 72, quand Lagerfeld (Daniel Brühl) n’est pas encore une griffe et à peine un nom. Couturier mercenaire au service du plus offrant, il dessine pour plusieurs marques de prêt-à-porter sans apposer sa signature. Antithèse parfaite de so