Faire écran à l’usage des écrans : un écran de fumée ?

Les enfants et les écrans : attention ! Oui mais à quoi ? Et comment ?  Gérard Giraudon et Thierry Viéville nous rassemblent des références et des éléments pour nous montrer que [dé]laisser les enfants devant les écrans est bien négatif et qu’il est préférable d’y aller avec elles et eux. Dans cet article, après par exemple [10], on questionne non seulement la pratique des enfants mais aussi  « notre ´´ pratique de parents face à nos enfants. Marie-Agnès Enard et Pascal Guitton.

©naitreetgrandir.com, voir [10]

Il existe des effets négatifs du numérique sur notre vie et notre santé ainsi que celles de nos enfants [0], tout particulièrement lors d’un mésusage . Les scientifiques en informatique en sont conscient·e��s et font partie de celles et ceux qui alertent sur le sujet [0], et relaient les travaux  scientifiques d’autres disciplines qui permettent de comprendre le caractère négatif potentiel de ces effets et de les dépasser [9]. On parle ici de résultats scientifiques [9,11] au delà de l’emballement des médias alimenté par les promoteurs des “paniques morales” ([9], pp 4).

L’angle d’attaque de telles paniques est souvent résumé par le seul terme “écran”,  la plupart du temps associé au mot “enfant”, faisant ainsi un amalgame entre contenant et contenu, entre adultes et société. Il en ressort généralement des questions mal posées qui ne peuvent conduire qu’à des polémiques faisant peu avancer le débat. Par ailleurs, la question des impacts de la technologie sur le développement de l’enfant est fondamentale et le numérique n’y échappe pas.

© 1zoom.me

Abordons ici la question des contenus. Les études scientifiques sur l’impact des “contenus numériques disponibles à travers différentes interfaces matérielles” qu’on réduit souvent au seul “écran” alors qu’on pourrait par exemple y inclure aussi des systèmes robotisés. Mais concentrons nous ici sur les interfaces que l’on nommera par abus de langage, pour la facilité d’écriture, encore “écran. Les résultats sont difficiles à interpréter car il manque un cadre de comparaison formel par exemple pour établir et mesurer la dépendance [1].  On note par ailleurs que les effets négatifs des écrans sont plus importants dans les populations moins favorisées [4]. À l’inverse, les effets cognitifs des écrans peuvent être positifs [4,5,6] mais pas en cas d’usage avant le sommeil, qu’ils perturbent [3].

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On doit donc avant tout considérer les usages qui en sont faits et arrêter de considérer le paramètre de durée (temps devant les écrans) qui occulte d’autres éléments au moins aussi importants [1,3] comme illustrés ci-après.

Les études les plus fines distinguent les usages, en particulier passif (comme la télévision) versus actif, autrement dit isolé (on « colle » l’enfant devant les écrans) opposé à  coopératif. 

C’est l’usage de ces écrans pour « occuper » les enfants pendant que les adultes vaquent à leurs autres tâches qui présente un effet délétère [2].

Au delà, une plus grande quantité d’utilisation de l’écran (c’est-à-dire des heures par jour/semaine) est associée négativement au développement du langage de l’enfant, tandis qu’une meilleure qualité d’utilisation de l’écran (c’est-à-dire des programmes éducatifs et un visionnage conjoint avec les adultes éduquant) est positivement associée aux compétences linguistiques de l’enfant [3]. 

©Luca @ wikicommons

Comparons « screen-time » versus « green-time » [4], c’est à dire le temps passé dans l’environnement extérieur (ex: forêt, parc public). On observe là encore qu’il faut distinguer l’usage modéré avec des contenus choisis et un accompagnement éducatif qui a des effets positifs, de l’inverse qui peut avoir un effet négatif, voire très négatif. Le « green-time » limite les effets cognitifs négatifs des écrans, au delà de l’effet bien connu de l’hyper sédentarité qui conduit à des troubles physiologiques dérivés [6].

C’est donc, au niveau cognitif et éducatif essentiellement un enjeu de contenu numérique. Ainsi,  la lecture sur écran est moins efficace que sur un livre papier, sauf si le contenu est « augmenté » (accès à un lexique, récit interactif, …) [5], en notant que  la lecture en interaction avec une personne éducative référente augmente les performances dans les deux cas.

On insistera finalement sur ce que la communauté de l’éducation à l’informatique sait depuis longtemps :

  –comprendre comment fonctionnent les ordinateurs conduit à un bien meilleur usage récréatif et éducatif, et aussi souvent moins dépendant [7] ;

  – pour apprendre les concepts informatiques, les « activités débranchées » où on « éteint son écran pour aller jouer au robot dans la cour »  sont les plus efficaces au niveau didactique et pédagogique [8].

Pour moins utiliser les écrans, le plus important est de commencer à les utiliser mieux.

Gérard Giraudon et Thierry Viéville.

Références :

[0] https://www.lemonde.fr/blog/binaire/2023/10/06/ntic-etat-des-lieux-en-france-et-consequences-sur-la-sante-physique-partie-1/
[1] https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0190740922000093
[2] https://www.pafmj.org/index.php/PAFMJ/article/view/6648
[3] https://jamanetwork.com/journals/jamapediatrics/article-abstract/2762864 
[4] https ://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0237725
[5] https://journals.sagepub.com/doi/full/10.3102/0034654321998074 
[6] https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0765159711001043 
[7] https://inria.hal.science/hal-03051329
[8] https://inria.hal.science/hal-02281037 
[9] https://www.cairn.info/les-enfants-et-les-ecrans–9782725643816-page-150.htm
[10] https://naitreetgrandir.com/fr/etape/1_3_ans/jeux/usage-ecrans-parents-equilibre
[11] https://www.u-bordeaux.fr/actualites/Addiction-aux-écrans-mythe-ou-réalité

 

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