Édito | Alexandre Poplavsky Législatives : le laboratoire du Royaume-Uni

L'Est Républicain - 03 juil. 2024 à 05:05 - Temps de lecture :
 | 
Alexandre Poplavsky, rédacteur en chef adjoint  Photo Pascal Brocard
Alexandre Poplavsky, rédacteur en chef adjoint  Photo Pascal Brocard

Il n’y a pas qu’en France où se tiennent des élections législatives anticipées cette semaine. Outre-Manche aussi. Et comme en France, le scrutin est convoqué après l’annonce soudaine d’une dissolution voulue par le Premier ministre conservateur Rishi Sunak. C’était le 30 mai dernier. Une campagne dense pour le Royaume-Uni qui connaîtra donc ce jeudi la nouvelle composition de son parlement. Voilà pour les similitudes avec les turpitudes hexagonales. Ce scrutin mérite toutefois toute notre attention. Car à l’inverse de la France où la crainte d’une vague RN mobilise l’arc républicain entre les deux tours, la Grande-Bretagne s’apprête à tourner la page de 14 ans de pouvoir conservateur dont l’apothéose du populisme a conduit Boris Johnson à entériner, par référendum, le Brexit en 2016. S’il y a encore quelques années une victoire des travaillistes semblait dans ce contexte totalement improbable, rien ne peut désormais l’empêcher aujourd’hui. Sous la houlette de Keir Starmer, marqué centre gauche, le Labour Party a en effet réussi à reconquérir lentement le cœur des grandes régions ouvrières abandonnées, croyait-on, aux mouvances les plus extrêmes du pays. Ce renversement est d’autant plus instructif que les principaux griefs contre le pouvoir sont identiques de part et d’autre du chenal qui nous sépare. Crise du pouvoir d’achat, inquiétudes sur l’immigration, dégradations des services publics… les maux sont les mêmes. Et dans les urnes, les votes expriment davantage un rejet plutôt que de l’adhésion. Keir Stermer bénéficie certes de ce populisme devenu finalement impopulaire, mais il a su recoudre les liens entre son parti et le monde ouvrier, sans froisser la City. À quel prix ? Ses détracteurs lui reprochent d’avoir fait le grand ménage au sein du Labour, de soutenir un programme plus au centre qu’à gauche. C’est un fait. Mais personne ne peut lui enlever cette première victoire : avoir fait refluer le vote extrême.