Éditorial

Confédération, 1867

L'article suivant est un éditorial rédigé par le personnel de l'Encyclopédie canadienne. Ces articles ne sont pas généralement mis à jour.

Le Canada ne naît ni d’une révolution ni d’une éclatante manifestation de l’ambition nationale, mais plutôt d’une série de conférences et de négociations régulières qui constitueront ultimement les termes de la Confédération le 1er juillet 1867. L’union des colonies de l’Amérique du Nord britannique, soit le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle‑Écosse et la Province du Canada (qui est aujourd’hui l’Ontario et le Québec), est la première étape d’une lente, mais progressive, édification nationale qui englobera d’autres territoires et concrétisera l’objectif d’un pays A mari usque ad mare, ce qui signifie « d’un océan à l’autre ».

Toutefois, l’appui au projet confédératif n’est pas universel. Ainsi, la plupart des populations autochtones ne sont pas consultées afin de savoir si elles veulent se joindre à la Confédération, et bon nombre d’autres s’y opposent farouchement avant et après 1867. De la résistance autochtone à celle des francophones, les adversaires de la Confédération, tout comme les Pères de la Confédération , ont façonné notre façon de voir le Canada.

Les motivations du projet confédératif

1791 Map of North America
L’union des colonies de l’Amérique du Nord britannique est une idée qui mijote depuis un certain temps déjà. Or, dans les années 1860, elle est devenue une question sérieuse dans la Province du Canada. Mais, dans les colonies de l’Atlantique, de nombreuses pressions doivent encore être exercées pour transformer en réalité politique les idées romantiques d’une seule nation nordique.

Les motivations du projet confédératif

Annexion par les États-Unis

La création d’une puissante armée américaine durant la guerre de Sécession (1861-1865) et le désir de la Couronne britannique de réduire son soutien financier et militaire à ses colonies d’Amérique du Nord alimentent les craintes d’une annexion par les Américains. Pour ceux qui craignent les envahisseurs du sud, le mouvement expansionniste canadien est envisagé comme une action préventive pour réduire la menace d’annexion des territoires de l’ouest et du nord des deux Canada par les États-Unis.

Commerce

L’idée qu’une confédération pourrait renforcer les colonies grâce à l’unité s’impose de plus en plus, surtout dans le sillage de l’abrogation par les États‑Unis du traité de réciprocité en 1866. Face à la baisse du marché extérieur, la Confédération pourrait faciliter la vente des marchandises entre les colonies.

Chemins de fer

À l’époque, les chemins de fer offrent un moyen nouveau et beaucoup plus rapide de transporter les marchandises et les ressources, ainsi que les troupes et les armes. Ils sont donc susceptibles de contribuer à stimuler les économies et à renforcer la défense des frontières. En 1862, la Province du Canada refuse en effet de payer une portion des coûts du projet du chemin de fer Intercolonial qui doit relier Halifax à Québec. Ce refus déclenche des discussions entre les colonies des Maritimes qui envisagent de se fondre en une seule entité dans l’espoir d’acquérir davantage de pouvoir politique et d’attirer les investissements d’outre-mer. Éventuellement, les Canadiens vont se joindre à ces discussions.

En route vers la Confédération

En route vers la Confédération

La Grande Coalition

Au début des années 1860, la politique de la Province du Canada est marquée par l'instabilité et se trouve dans une impasse, des conséquences directes de l’ union du Haut et du Bas-Canada survenue 20 ans plus tôt. La Grande Coalition de 1864 unit les réformistes de George Brown, les conservateurs libéraux de John A. Macdonald au Canada-Ouest et les bleus de George-Étienne Cartier au Canada-Est. Elle marque un tournant de l'histoire canadienne, ouvrant la voie à la Conférence de Charlottetown .

Conférence de Charlottetown

La Conférence de Conférence de Charlottetown de septembre 1864 met en marche le projet de la Confédération. La réunion rassemble des délégués du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse et de l’Île-du-Prince-Édouard afin de discuter de l’union de leurs trois provinces. La Grande Coalition de la Province du Canada – qui n’était pas sur la liste initiale des invités – parvient néanmoins à les convaincre de travailler à l’union de toutes les colonies de l’ Amérique du Nord britannique.

Pères de la Confédération

Selon Thomas D'Arcy McGee, la Conférence de Charlottetown donne lieu à un « extraordinaire armistice dans la guerre entre les partis » qui pave la voie à la Confédération.

Les 36 hommes que l’on considère habituellement comme les Pères de la Confédération sont ceux qui ont représenté les colonies de l’Amérique du Nord britannique lors d’au moins une des conférences qui ont mené à la Confédération. La question de savoir qui d’autre pourrait recevoir ce titre a fait l’objet de plusieurs débats. La définition peut être étendue de manière à inclure ceux dont la participation s’est avérée essentielle pour la création du Manitoba (Louis Riel ), le ralliement de la Colombie-Britannique (Amor de Cosmos) et de Terre-Neuve ( Joey Smallwood) à la Confédération, et la création du Nunavut ( Tagak Curley).

Mères de la Confédération

Province House Ball 1864

Les femmes et les filles des 36 hommes initialement désignés ont également été décrites comme étant les Mères de la Confédération pour le rôle qu’elles ont joué dans l’organisation des activités sociales qui constituèrent des étapes essentielles au bon déroulement des conférences de Charlottetown, de Québec et de Londres. Les archives officielles des conférences de Charlottetown et de Québec de 1864 sont partielles. Si l’on connaît aujourd’hui la dynamique sociale et politique de ces conférences, c’est surtout parce les historiens ont pu consulter les lettres et les ouvrages des Mères de la Confédération. Ces écrits permettent non seulement de porter un regard sur l’expérience des femmes privilégiées de cette époque, mais également d’attirer l’attention sur leur contribution à la création de documents historiques ainsi que sur le rôle qu’elles ont tenu dans le paysage politique.

Conférence de Québec

Des délégués mettent le cap sur Québec pour y poursuivre les discussions sur la création d'un pays amorcées le mois précédent à Charlottetown. Ils peaufinent et consolident les grandes décisions prises à Charlottetown et rédigent les 72 résolutions qui serviront d'assise à la Confédération. Parmi les décisions importantes prises à Québec, notons la composition du Parlement et la répartition des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

Confédération, 1867

Conférence de Londres, 1866

Redoutant le coût de la défense des colonies d’Amérique du Nord contre d’éventuelles agressions américaines, le secrétaire britannique aux Colonies Edward Cardwell est un farouche partisan de la Confédération. Il enjoint aux gouverneurs de l’Amérique du Nord d’appuyer l’idée, ce qu’ils font. La Conférence de Londres, qui a lieu de décembre 1866 à février 1867, est l’étape finale de la transformation des 72 résolutions de 1864 en une loi. L’ Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867 (maintenant appelé Loi constitutionnelle de 1867) en est le résultat. Cette loi est adoptée par le Parlement britannique et signée par la reine Victoria le 29 mars 1867. Elle entre en vigueur le 1er juillet 1867, un anniversaire que soulignent aujourd’hui les Canadiens par la célébration de la fête du Canada.

Perspectives autochtones

Les peuples autochtones ne sont pas invités ou représentés aux conférences de Charlottetown et de Québec, et ce, bien qu’ils privilégient de relations et d’engagements soi-disant bilatéraux (de nation à nation) avec la Couronne d’après les traités historiques. Une attitude paternaliste envers les Autochtones empêche effectivement les premiers peuples canadiens de participer aux discussions formelles sur l’unification de la nation.

En dépit de l’exclusion des Autochtones, la Confédération a de réelles répercussions sur leurs communautés. En 1867, le gouvernement fédéral assume la responsabilité des affaires autochtones des colonies. Grâce à l’achat de la Terre de Rupert en 1869, le Dominion du Canada accroît son influence sur les peuples autochtones qui y vivent. Pour aménager, coloniser et revendiquer ce territoire, le Dominion signe une série de 11 traités entre 1871 et 1921 avec divers peuples autochtones en garantissant de l’argent, certains droits territoriaux et d’autres concessions contre leurs terres ancestrales. De nombreuses promesses ne sont pas tenues ou sont mal comprises par les signataires. Au cours des années qui suivent la Confédération, les programmes gouvernementaux visant l’assimilation se multiplient, notamment les réserves, la Loi sur les Indiens et les pensionnats indiens.

Le Dominion s’agrandit

La politique britannique en faveur de la confédération de l’Amérique du Nord se poursuit sous les successeurs de Cardwell. La Compagnie de la Baie d’Hudson vend la Terre de Rupert au Canada en 1870, et le jeune pays intègre le Manitoba et le Territoire du Nord‑Ouest la même année. La Colombie-Britannique entre dans la Confédération en 1871, suivie de l’Île‑du‑Prince‑Édouard en 1873. Le Yukon est créé en 1898, puis les provinces de l’ Alberta et de la Saskatchewan en 1905.

Après avoir rejeté la Confédération en 1869, Terre‑Neuve‑et‑Labrador y adhère enfin en 1949. En 1999, le Nunavut, qui veut dire « notre terre » en inuktitut, est détaché des Territoires du Nord‑Ouest dans le cadre du règlement de la plus importante revendication territoriale autochtone de l’histoire du Canada.