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Canot d’écorce de bouleau

Le canot d’écorce de bouleau était le principal moyen de transport sur l’eau des peuples autochtones des forêts de l’Est, et plus tard celui des voyageurs, qui l’ont utilisé pendant le commerce des fourrures au Canada. Léger et facile à manœuvrer, le canot d’écorce de bouleau était parfaitement adapté aux déplacements, l’été, sur le réseau de ruisseaux, d’étangs, de lacs et de rivières du Bouclier canadien. Avec le déclin du commerce des fourrures, au 19e siècle, le canot devient plutôt un véhicule récréatif. Bien que la plupart des canots d’aujourd’hui ne soient plus faits d’écorce, l’histoire du canot d’écorce et sa fabrication artisanale très en vogue en ont fait un véritable symbole culturel canadien.

Canot d'écorce de bouleau
Pour construire un canot, on déshabille le bouleau de son écorce. Celle-ci est alors placée à l'intérieur d'un cadre en pieux, cousue et attachée. Les côtes sont fixées en position et les coutures rendues étanches par de la résine d'épicéa.
Canot d'écorce de bouleau
Pour avancer à l'intérieur des voies navigables, à la recherche de rennes, les groupes autochtones du Nord du Canada montaient à bord de grands canots d'écorce, comme celui illustré ici, datant de 1926.
Canot algonquin
Le canot d'écorce des Algonquins était idéal pour se déplacer sur les rivières et les lacs séparés par d'étroites lignes de partage des eaux ou des portages (oeuvre de Lewis Parker).
« Shooting the Rapids »
« Shooting the Rapids » en canot. Peinture de Francis Anne Hopkins.
Canot kootenay
Le canot kootenay-salish, dont les extrémités se prolongent sous l'eau, était conçu pour traverser les rapides des rivières du sud de la Colombie-Britannique.

Histoire

Le canot est d’abord une nécessité pour les peuples autochtones nomades du Nord comme les Innus (Montagnais-Naskapi), les Ojibwés, les Wolastoqiyik (Malécites) et les Algonquins. Après l’arrivée des Européens, les voyageurs utilisent eux aussi le canot pour explorer l’intérieur du continent et y faire du commerce, notamment en connectant les lignes d’approvisionnement de la traite des fourrures à des postes centraux comme celui de Montréal.

À l’époque, Samuel de Champlain louange l’élégance et la vitesse du canot, allant jusqu’à dire qu’il constitue l’unique moyen pour naviguer au Canada. L’artiste et écrivain Edwin Tappan Adney, qui consacre une bonne partie de sa vie à la promotion et à la préservation des techniques de fabrication de canot artisanales, affirme que les bateaux européens sont maladroits et absolument inutiles. Ainsi, le canot d’écorce de bouleau est si supérieur qu’on l’adopte presque partout et sans exception au Canada. Par conséquent, la plupart des explorateurs européens qui parcourent l’intérieur du continent pour la première fois le font dans un canot d’écorce de bouleau.

Fabrication

L’écorce de bouleau, lisse, dure, légère, résistante et imperméable, est la matière idéale pour la fabrication du canot. Comparativement à l’écorce d’autres arbres, celle du bouleau constitue une matière supérieure, puisqu’elle s’enroule autour du tronc plutôt que de le parcourir sur la longueur, ce qui fait en sorte qu’elle est plus malléable. Le bouleau se trouve presque partout au Canada, sauf à certains endroits, comme à l’ouest des Rocheuses, dans la région subarctique, où l’on utilisait de l’écorce d’épinette ou de cèdre, faute de bouleaux.

Le savoir-faire des fabricants de canots d’écorce se passe alors de génération en génération. La structure du canot est généralement en bois de cèdre, que l’on fait d’abord tremper dans l’eau pour le modeler afin de former un canot. Les joints sont faits à partir de racines de pin blanc ou d’épinette, qui sont cueillies, fendues et bouillies par les femmes. Les joints sont ensuite imperméabilisés grâce à de la résine d’épinette ou de pin chaude, qu’on applique à l’aide d’un bâton. Pendant le voyage, les rameurs doivent appliquer de la résine presque tous les jours pour garantir l’imperméabilité du canot. Des couleurs, des dessins ou encore des insignes d’entreprises sont souvent peints sur la proue des canots. La forme et la grandeur des canots dépendent de l’utilisation qu’on en fera et des coutumes du fabricant.

Le commerce des fourrures, en pleine expansion, crée une hausse significative de la demande en canots, et les producteurs autochtones ne sont plus en mesure de fournir une offre équivalente. Autour de 1750, les colons français mettent sur pied une usine de canots à Trois-Rivières.

Types de canot et routes

Le type de canot d’écorce de bouleau utilisé par les Autochtones et les voyageurs diffère selon la route à parcourir et les marchandises à transporter.

Le célèbre canot du maître, duquel le commerce des fourrures dépend, fait jusqu’à 12 m de long, transporte un équipage de 6 à 12 membres et une charge allant jusqu’à 2 300 kg sur la route de Montréal au lac Supérieur. Au-delà du lac Supérieur, le plus petit canot du Nord accueille 5 ou 6 voyageurs et une charge maximale de 1 360 kg sur les petits lacs, les rivières et les ruisseaux du Nord-Ouest. On propulse le canot à l’aide de petits coups de rames, à raison de 40 à 45 coups par minute.

Celui à l’avant a en main une grande rame pour manœuvrer dans les rapides, et celui à l’arrière sert de gouvernail. Un canot se déplace entre 7 et 9 km par heure, et un canot spécial, ou express, qui transporte un petit équipage et peu de marchandises peut couvrir de longues distances au cours de journées typiques de 18 heures.

Signification culturelle

Le canot est l’un des piliers culturels du Canada et symbolise l’identité nationale. Par exemple, en 1935, le dollar canadien, conçu par Emanual Hahn, présente sur son revers l’image d’un voyageur et d’un Autochtone qui naviguent ensemble dans un canot, près d’un pin gris, sous les aurores boréales, transportant avec eux des fourrures de la Compagnie de la Baie d’Hudson. Le canot figure également dans l’histoire populaire québécoise La Chasse-galerie, et demeure de nos jours un symbole de choix pour les designers et les publicitaires qui souhaitent évoquer l’identité canadienne.